Histoire de la Maison des Italiens

La Maison des Italiens – La Casa degli Italiani

Casa degli Italiani

C’est LE ‘’monument’’ de la communauté italienne, et fait désormais partie de l’histoire de Lyon.
Cette maison est située à l’angle de la rue du Dauphiné et de l’avenue Lacassagne, à Sans Soucis dans le 3ème arrondissement de Lyon.
Voici son histoire telle qu’elle nous a été racontée par nos anciens.

Maison des Italiens – années 60

C’est une maison à deux étages, qui avait un joli portail en fer forgé donnant sur la rue du Dauphiné, on y accédait par une large allée traversant le jardin et annexé à l’arrière de la maison, un grand hangar, qui avait été bâti à l’endroit où il devait y avoir un jardin potager. Il parait que pendant la guerre ce hangar était un atelier de confection d’uniformes militaires.
Dans les années qui suivirent la guerre de 39/45 il y eut un énorme afflux d’ouvriers d’italiens qui cherchaient du travail et un avenir meilleur, beaucoup arrivaient après avoir franchi à pied à le col du Petit St. Bernard, ou le col du Fréjus par Bardonecchia. La plupart du temps la gendarmerie les récupérait et les envoyait au Centre Lumière avenue Lacassagne, pas très loin de la Maison des Italiens. Aujourd’hui ce centre d’accueil a disparu, mais c’est ici que les employeurs venaient chercher des bras.

Col du Petit St Bernard

Il faut se rappeler que cette période était très difficile pour tout le monde, mais en particulier pour les italiens car en juin 1940 Mussolini avait déclaré la guerre à la France, et même occupé une partie du territoire. C‘est un souvenir très douloureux car les italiens, déjà très nombreux, étaient devenus ennemis.
Plus tard après la chute du gouvernement et l’élimination de MUSSOLINI par les italiens eux-mêmes, après la guerre civile, la nouvelle politique a fait qu’en 1943 l’Italie s’allie aux américains libérateurs de son territoire et à la France.
Ces pauvres italiens n’avaient aucune faute, mais on peut comprendre, que si l’accueil des français était parfois plutôt frais, ces italiens adoptaient un ‘’profil bas’’, ils se réunissaient entre eux, à des endroits ‘’italiens’’, les pizzerias n’existaient pas encore !

Cette maison appartenait à des ‘’piémontais’’ les familles Valentino et Cavagnolo (célèbres fabricants d’accordéon de Villeurbanne) qui étaient considérés comme des italiens un peu particuliers : leur patois était presque du français ! Les propriétaires exploitaient l’ensemble immobilier, devenu une sorte de guinguette, on y dansait dans le hangar-atelier, et dans le jardin il y avait des jeux de boules.

Cette bâtisse fut mise en vente dans les années 1950 et sous l’impulsion du Consul Général d’Italie Monsieur Gustavo Orlandini en charge à l’époque (de décembre 1954 à janvier 1959), un groupe d’italiens organisa une collecte, et demanda un prêt sur 15 ans, à une banque italienne, basée à Lyon, au Banco di Roma, et l’affaire fut conclue le 17 juillet 1957 pour la somme de 4.900.000 francs dont 3.000.000 comptant. Désormais cette maison, les meubles et le matériel (piano, tables chaises rondes et rectangulaires, tabourets, bar, banque caisse, etc.) appartenaient à tous les italiens de Lyon et comme c’était juridiquement impossible au Comité Italien d’Assistance (CO.AS. IT à l’époque, puis CI.AS par la suite et Maison des Italiens de Lyon maintenant) représenté par Messieurs CAVALLO et BACHI respectivement président et trésorier.
Le consul Orlandini était un homme cultivé il avait fait réaliser une scène pour les pièces de théâtre, il avait même peint lui-même les décors, plus tard lors de travaux de rénovation la scène a été démolie mais il y a toujours la trace au sol.
Il y avait un bar, une cave avec un bel escalier en pierre, (qui existe toujours) on y accédait par une grande trappe au sol située dans l’entrée. La maison avait aussi des cuisines transformées par la suite.
L’associations des Anciens Combattants Italiens a été une des premières à l’utiliser comme siège : forcément, car tous les hommes étaient des anciens combattants de la guerre de 14/18 ou celle de 39/45. Par la suite un grand nombre d’associations italiennes, dont beaucoup ont disparu, aura utilisé cette maison comme siège jusqu’à nos jours.
L’activité, la fréquentation y était intense, les bals du samedi soir étaient mémorables et très fréquentés, beaucoup de couples se sont formés, des mariages y ont été fêtés, puis des baptêmes. Le rôle social de cette maison aura été immense pendant toutes ces années passées.
Les bals étaient très renommés, les italiens avaient une réputation de bons musiciens, chanteurs, danseurs, et tout naturellement les amis français fréquentaient aussi cet ’’établissement’’ qui facilita les échanges.
Au fil des années les italiens se sont intégrés et l’utilisation, de la ‘’Casa degli Italiani’’, a beaucoup changé. A l’étage supérieur il y avait des appartements dont les locataires avaient parfois le rôle de gardiens. Il y avait aussi une salle où on donnait des cours de français aux italiens qui arrivaient encore en nombre jusqu’aux années 1965, et aussi des cours d’italiens aux enfants des italiens.
Ensuite ces appartements ont été transformés en bureaux pour divers organismes le C.I. AS propriétaire, le Coascit/Aplicit chargé des cours d’italien, disparu depuis peu, le COMITES (Comité Italiens à l’Etranger) organisme dont les membres sont élus au suffrage universel.
Il y a eu deux vagues de travaux de rénovation, en 1984 et en 2004, lors de l’élargissement de la rue du Dauphiné la maison a perdu 160 mètres carrés de surface et donc ses jeux de boules et réduit son jardin, mais l’expropriation a permis de financer partiellement les travaux de transformation de la salle des fêtes.
Lors de ces opérations, des bénévoles italiens comme toujours se sont retroussés les manches pour réaliser des économies consistantes, à l’image des fondateurs en 1957.
A l’heure actuelle la Maison des Italiens est gérée par son propriétaire ‘’La maison des Italiens de Lyon’’ ex C.I.AS (pour Comité Italien Assistance) association loi de 1901, déclarée à la Préfecture. En outre elle fédère les associations italiennes de la circonscription consulaire de Lyon. Son activité sociale est tournée vers l’organisations de séjours balnéaires en Italie pour les personnes âgées. Par le passé beaucoup d’enfants étaient envoyés en Italie en colonie de vacances.
Elle est toujours le siège social de divers organismes et associations italiennes : la DACI (Descendants des Anciens Combattant Italiens), ANFE (familles émigrées) et des associations régionales comme APULIA (Région des Pouilles), Vicentini nel Mondo (Veneto), Fogolâr Furlan (Frioul), etc. ces associations ont un rôle important pour la sauvegarde de la diversité culturelle italienne et donc française.
Ces associations en qualité d’adhérents de l’Association Maison des Italiens disposent aussi d’une petite salle de réunion dans la cour, et d’une grande salle pour les assemblées générales, les fêtes, les conférences, expositions, réunions importantes comme la fête nationale italienne du 25 avril (correspondant au 8 mai français) ou la commémoration du 4 novembre (correspondant au 11 novembre français). En ces occasions le Consulat Général, et autres organismes déposent des gerbes sous la plaque en granit, qui rappelle le sacrifice de tant d’Italiens en terre de France, un grand cadre avec la longue liste de noms se trouve à l’intérieur en rappel permanent.
Cette grande salle pouvant contenir 150 personnes, équipée d’une cuisine moderne, baptisée depuis peu ‘’Espace Dauphiné Lacassagne’’ est très fonctionnelle. Elle est louée à des tiers, pour des assemblées générales d’associations, des fêtes familiales, expositions, cours de gymnastique, concours, lotos. Ces locations ponctuelles, que nous souhaitons développer, sont des ressources indispensables pour l’autonomie financière et le maintien en activité de ce ‘monument’.
Un accueil est assuré tous les après-midis, et du personnel bénévole compétent qui diffuse toutes les informations en relations avec l’intense vie ‘’italienne’’ de Lyon.
Cette Maison des Italiens est devenue un des lieux ‘’historiques’’ de Lyon, elle a retrouvé depuis quelques années l’activité d’antan, les descendants désormais français, la font vivre en souvenir et honneur de leurs ancêtres parents et grands-parents, qui ont su en des temps difficiles se rassembler et travailler ensemble pour nous léguer un bien commun à haute valeur sociale.